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8 - Gestion des prairie: les effets du temps

Habitat - Prairies : lutter contre les effets du temps

Malgré le respect des recommandations de gestion des prairies, la dégradation progressive des pâtures est inévitable. Des plantes d'espèces indésirables colonisent naturellement la surface. Le sol s'épuise, s'acidifie. Les plantes alimentaires vieillissent et meurent. A défaut d'une intervention humaine, le rendement fourrager s'abaisse.

Pour se rendre compte de cette perte de production, l'éleveur doit être attentif aux signes de souffrance que ce biotope peut manifester. Pour connaître l'état d'une prairie, une méthode fiable consiste à réaliser une analyse nutritionnelle du produit de fauche d'une surface représentative. Il s'agit d'un procédé assez lourd. Un diagnostic moins pointu mais suffisant peut être établi par l'observation visuelle.

Coup d'œil à la prairie

Il est préférable d'effectuer cette observation visuelle de votre prairie une quinzaine de jours après une pluie, lors d'une repousse significative. Deux facteurs sont alors à prendre en considération :

Le taux de dégarnissage : c'est la surface sur laquelle plus rien ne pousse. Il ne s'agit pas toujours d'une aire d'un seul tenant, mais bien souvent d'un espacement trop large entre chaque plant.

Le rapport en pourcentage entre les plantes alimentaires et les "mauvaises herbes". Sont considérés comme de bonnes valeurs alimentaires pour les équidés les fétuques, les ray-grass, le pâturin, la fléole, le trèfle (en quantité modérée).

Si la surface du pré comporte plus de 70% de bonnes plantes, aucune intervention spécifique ne s’impose. La recette pour conserver les qualités alimentaires de la prairie pour plusieurs années est simple : un temps de repos suffisamment long entre chaque mise, un taux d'animaux à l’hectare raisonnable, et un éventuel apport discret d’engrais NPK en fin d’hiver. Un rapport plus faible, compris entre 30% et 70%, nécessite une réaction vigoureuse de la part de l’exploitant : allongement des temps de repousse, diminution du chargement en animaux, apport calculé d'engrais NPK après analyse des plantes ou du sol, amendement calcique pour rectifier l'acidité du support et destruction sélective et raisonnée des mauvaises herbes.

Enfin, un rapport entre plantes de bonnes valeurs alimentaires et les plantes adventices inférieur à 30%, ou un taux de dégarnissage de la surface de plus de 20% rendent illusoires les manœuvres précédentes. Seul le recours à un sursemis, ou encore plus drastiquement à une destruction totale de la pâture et à un re-semis, ramènera le rendement alimentaire à un niveau acceptable.

Le sursemis

Le sursemis consiste à semer sur une prairie déjà construite des végétaux alimentaires pour augmenter leur densité à l'hectare et étouffer les plantes indésirables sous leur nombre. La bonne période pour effectuer cette manœuvre est l'automne, les plantules résistant bien à l'hiver. Le sol est fragmenté superficiellement à la herse, semé à la volée ou à la machine puis roulé pour appuyer la graine sur la surface de pousse et l'enfouir partiellement.

La présence des autres plantes gêne la bonne implantation des semences, c'est pourquoi il est nécessaire de majorer la quantité de graines à l'hectare lors de sursemis. Par exemple, il faut compter 30 à 35 kg par hectare de graminées pour un sursemis au lieu de 20 à 25 kg pour un semis simple. Un autre inconvénient de cette méthode est un ralentissement de la croissance de la végétation en place, aussi bien des mauvaises herbes que des bonnes. Il faut donc s'attendre à une perte de rendement la première année.

Le re-semis

Quand la situation est vraiment mauvaise, que la qualité du pâturage est réellement dégradée, il est préférable de repartir à zéro et de reconstruire totalement la prairie plutôt que de perdre son temps et son argent dans des efforts de fertilisation et d'amendement voués à l'échec.

En automne, après des pluies suffisantes pour avoir initié une repousse et après un temps de repos d'au moins 20 jours, la végétation est entièrement détruite par application d'un désherbant total pas trop nocif pour l'environnement (s'il en existe !), de type glyphosate ou aminotriazole. Il est indispensable que le traitement se fasse par temps sec : la survenue inopinée d'une pluie dans les premières heures diminuerait l'efficacité et augmenterait la pollution par lessivage. Il est également nécessaire d'agir sur des plantes en croissance. Pour cela, la température doit être supérieure à 10°C.

Pendant tout l'hiver, les végétaux morts vont se décomposer et sous l'action des vers de terre et des bactéries, le sol va s'enrichir de ces apports azotés. C’est au printemps que le sol va être travaillé. Le labourage n'est pas nécessaire, même plutôt néfaste car il rend le sol trop meuble et incapable de supporter le poids des animaux. L’usage du rotavator est bien préférable car son action est plus superficielle. Le sol est ainsi travaillé sur une profondeur de 5 à 10 cm puis laissé au repos 8 jours. Le semis est alors effectué sur une terre ni trop sèche, ni détrempée, et doit être suivi d'un roulage. La phase de levée qui suit est un passage difficile car les plantules sont parfois sujettes à des attaques sévères de la part des limaces et des tipules (larves des fameux "cousins" qui nous rendent visite en automne). Il faut parfois recourir à un traitement chimique contre ces parasites. Dix semaines après la levée, les chevaux sont mis à pâturer quelques heures par jour pendant quelques jours pour éviter que la pousse ne se fasse trop en hauteur et favoriser le tallage des tiges. Mais le début de l'exploitation ne pourra se faire au mieux que quatre mois après le semis.

Le choix des espèces utilisées en semis se fait en fonction de l'adaptation de celles-ci au climat et au sol de la région. Il est habituel d'utiliser un mélange de graminées et de légumineuses. Les premières sont bien sûr prépondérantes : les ray-grass, d'excellente valeur alimentaire, sont souvent préconisés mais ils sont finalement assez peu appréciés par les chevaux. Ceux-ci préfèrent des herbes plus rustiques comme la fétuque ou le dactyle. Les légumineuses sont utilisées pour leur capacité à fixer l'azote de l'air et à enrichir le sol en matières azotées. Attention, elles sont peu consommées par les équidés, parfois toxiques en grande quantité, et rapidement envahissantes. C'est pourquoi elles doivent figurer en petite quantité dans le mélange de semis. Beaucoup de mélanges sont possibles.

Un exemple parmi tant d'autres (quantité à l'hectare) : fétuque élevée 10 kg, ray-grass anglais 10 kg, dactyle 5 kg, trèfle blanc 2 kg. Pour faire un choix définitif, il convient de se renseigner auprès des agriculteurs et des coopératives de votre région.

Sur cette prairie toute nouvelle, et afin de la garder productive le plus longtemps possible, il faudra appliquer les règles de repousse et de pâturage, et ne pas laisser les plantes adventices faire leur nid, en traitant rapidement et à bon escient. Une ligne de conduite à suivre afin de réaliser des économies d'aliments...

L'amendement calcique

Au fil du temps, le sol d'une prairie devient de plus en plus acide. Très approximativement, son pH s'abaisse de 0,1 points par an (plus le pH est bas, plus le sol est acide) par perte de son calcium sous l'effet du lessivage par les pluies d'une part, et de son utilisation par les plantes puis par les animaux d'autre part.

La dégradation des substances organiques contribue, elle aussi, à augmenter l'acidité. Or un sol acide est un mauvais milieu de vie pour la plus part des bonnes espèces végétales ainsi que pour les bactéries nécessaires au cycle de l'azote. De plus, il favorise la pousse de plantes non souhaitées tel que le rumex. L'apport de chaux vive ou de de carbonate de calcium permet de lutter contre ce phénomène. Les apports sont à moduler du pH mesuré du sol. L'effet de l'amendement est assez long à se produire. Le rendement est sensiblement augmenté à partir de la troisième année.

Se débarrasser des mauvaises herbes...

Tous les éleveurs ont l'impression que les mauvaises herbes poussent plus vite et mieux que les bonnes. Ceci est le résultat de plusieurs facteurs : elles sont peu ou pas consommées par les animaux et sont ainsi sélectionnées, elles sont rustiques et se sèment naturellement sans difficulté, elles se contentent de sols pauvres. Ainsi elles envahissent allégrement les pâtures et étouffent les plantes alimentaires. Il est indispensable de contrôler leur prolifération sous peine d'enregistrer une perte sévère de rendement à l'hectare. Le développement des rumex ou des chardons provoque de sérieux manques à gagner. Certaines de ces plantes adventices sont de plus toxiques, comme le séneçon ou le millepertuis.

Un moyen simple et écologique est de passer régulièrement un gyrobroyeur. Beaucoup d'espèces ligneuses supportent mal une coupe régulière et leur dissémination s'arrête. Les fougères régulièrement fauchées régressent. Ainsi le gyrobroyage d'un pré doit être effectué au moins deux fois par an, en insistant particulièrement sur les zones de refus. C'est au stade boutons floraux, c'est à dire quand la plante a utilisé une grande partie de ses réserves pour construire les boutons qui vont donner des fleurs et des graines, qu'il est préférable de travailler. Attention, un fauchage à un stade plus tardif n'empêche pas le développement sur le sol des fleurs et des graines chez certains végétaux !

Malgré cela le recours à des substances chimiques est souvent inévitable. les produits disponibles sont très nombreux et tous polluants. En prairie installée, on a en général recours à des désherbants sélectifs dont l'utilisation est réservée aux professionnels. Il faut donc passer par eux pour faire traiter sa pâture. Pour les mauvaises herbes particulièrement résistantes comme le rumex, le traitement général est de toute façon peu efficace, et l'éradication ne peut être obtenu que par le traitement pied par pied. Il faut bien de la patience, d'autant plus que l'application devra être refaite sur certaines plantes l'année suivante, mais les résultats sont excellents et l'environnement est moins perturbé. L'idéal est d'agir précocement dès l'apparition des premiers plants de rumex, de chardons ou de séneçon sans leur laisser le temps de se répandre plus avant. Rappelons que la destruction des mauvaises herbes comme les chardons est une obligation réglementaire dans beaucoup de régions !

 

Références :
Pierre Castillon et col. : la fertilisation des prairies, chambre d'agriculture Midi-Pyrénées
Claude Gueydon : vers une meilleure fertilisation des prairies, chambre d'agriculture de la Loire
Olivier Peltier : renseignements de l'apport d'amendement minéraux basiques sur prairies permanentes,
agriculture Balthazard et Cotte, service agronomique, 03800 Gannat
Revue "Cheval santé" n°30.

 



02/08/2011
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